Écouter des audiobooks : une lecture de paresseux ?

Écouter des audiobooks : une lecture de paresseux ?

Dans notre ère où le temps s'écoule à toute vitesse et où les emplois du temps sont saturés, les livres audio émergent comme des refuges pour les amoureux des mots. Pourtant, une idée persiste : celle que "écouter n'est pas lire", que les livres audio sont une option de lecture réservée aux paresseux. Mais est-ce vraiment le cas ?

 

Une expérience de lecture réinventée

Le livre audio offre une expérience de lecture laissant une ample place à l'imaginaire du lecteur tout en le guidant à travers l'interprétation des acteurs.

Il peut être l'allié parfait pour ceux qui trouvent la lecture traditionnelle intimidante ou trop chronophage. Et si certains pensent qu'écouter un livre est un raccourci, il faut souvent plus de 10 heures d'écoute pour parcourir les méandres d'une histoire. On a donc tout le temps de s'immerger dans l'histoire et de la savourer.

 

Accessibilité

L'un des atouts majeurs du livre audio réside dans sa capacité à rendre la lecture plus accessible, surtout d'un point de vue pédagogique. Les jeunes réticents à plonger dans de volumineux ouvrages peuvent ainsi être séduits par la magie d'une histoire transmise par la voix. L'émotion véhiculée par cette forme de narration facilite l'immersion dans le récit et peut même améliorer l'apprentissage.

Il ne faut pas oublier que si l'on considère les audiobooks comme n'étant pas de la lecture, alors on exclut les personnes aveugles pour qui le moyen de lecture le plus accessible est justement les livres audio. De même, énormément de personnes touchées par l'aphantasie préfèrent les audiobooks à la lecture classique, car les narrateurs peuvent ajouter de la profondeur à une histoire, ce que leur cerveau ne peut pas faire.

La possibilité de vaquer à d'autres occupations tout en écoutant un livre audio est également un avantage indéniable. Que ce soit en conduisant, en effectuant des tâches ménagères ou en faisant du sport, le livre audio permet de rentabiliser chaque instant de notre emploi du temps surchargé.

 

Une démocratisation croissante

Le public des audiobooks a considérablement évolué au fil du temps. Si auparavant, il s'adressait principalement à une tranche d'âge plus mature (40-45 ans) et citadine, il conquiert désormais un large éventail de générations et de profils, se démocratisant même chez les jeunes de 18-25 ans.

Les confinements récents ont d'ailleurs contribué à populariser cette forme de lecture, offrant une échappatoire bienvenue à ceux en quête de divertissement ou de réconfort.

Les tendances littéraires se transforment également. Alors que les livres audio étaient autrefois associés à des genres comme la méditation, la science-fiction et la fantasy gagnent désormais en popularité. Cette évolution reflète les préférences d'une clientèle plus jeune, désireuse d'explorer de nouveaux horizons littéraires.

 

L'impact des livres audio sur notre cerveau

Une récente étude publiée dans le "Journal of Neuroscience" nous invite à reconsidérer la façon dont notre cerveau perçoit la lecture et l'écoute d'une histoire. Menée par des chercheurs du laboratoire Gallant de l'UC Berkeley, cette recherche souligne que les réponses cérébrales à ces deux modes de narration sont étonnamment similaires.

Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont analysé les cerveaux de neuf participants alors qu'ils lisaient et écoutaient une série d'histoires provenant du "The Moth Radio Hour". En examinant de près comment chaque mot était traité dans le cortex cérébral, ils ont pu créer des cartes des cerveaux des participants, mettant en évidence les différentes zones activées lors de la compréhension de chaque mot.

Les résultats ont été surprenants : que les participants lisent ou écoutent les histoires, les mêmes zones cognitives et émotionnelles ont été stimulées. Cette constatation suggère que, pour notre cerveau, la forme de narration importe peu - ce qui compte, c'est le contenu et l'émotion transmise par l'histoire.

Fatma Deniz, chercheuse postdoctorale au laboratoire Gallant et auteure principale de l'étude, exprime sa surprise face à cette découverte. Les cerveaux des participants interprétaient les mots de la même manière, que ce soit en les écoutant ou en les lisant. Les cartes cérébrales créées à partir des données révélaient une similarité frappante entre les entrées auditives et visuelles.

Ces résultats pourraient avoir des implications importantes pour les personnes qui éprouvent des difficultés de lecture ou d'écoute. Par exemple, les enfants atteints de dyslexie pourraient bénéficier de l'accès aux livres audio, qui sont souvent disponibles en classe. En offrant des histoires dans différents formats, nous pourrions ouvrir de nouvelles portes à ceux qui ont du mal à s'engager avec la lecture traditionnelle.

Cette étude enrichit notre compréhension de la manière dont notre cerveau donne un sens aux histoires. Qu'elles soient lues ou écoutées, les récits continuent de captiver notre imagination et de nous transporter dans des mondes extraordinaires, offrant ainsi une fenêtre fascinante sur le fonctionnement de notre esprit.

 

En fin de compte, affirmer que "écouter des audiobooks ce n'est pas lire" est une généralisation simpliste. Les livres audio offrent une expérience littéraire enrichissante et diversifiée, ouvrant les portes de l'imagination à un public toujours plus large. Que ce soit pour se divertir, apprendre ou simplement s'évader, ils sont devenus une composante essentielle de notre paysage culturel contemporain.

 

Autrice : Salma El Mahmoudi

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